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MARILYN
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ENFIN LA VÉRITÉ SUR UN CRIME D'ÉTAT ? |
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ICI CD
EXCLUSIF
800 MB MARILYN MONROE POUR SEULEMENT 15
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La
parution en France, en Grande-Bretagne et aux États-Unis en octobre 1998 du livre de Don Wolfe, Marilyn Monroe, enquête sur un assassinat, a provoqué un choc ... ... Qui a tué Marilyn ? |
Dans la presse mondiale, la robe de Monica Lewinsky a déclenché une vaste
réflexion sur les périls encourus par la démocratie en Amérique à la suite de
fredaines. Tout éditorialiste digne de ce titre s'y tailla la plume. Notre Tocqueville,
dans sa tombe, en égaie son éternité et rit chaque jour. L'autre matin, sur ABC News,
relayé en clair par Canal +, Peter Jennings, le présentateur vedette, y alla d'un
commentaire désabusé: «Il a suffi de quelques semaines pour que le monde sache tout sur
la vie privée de Bill Clinton. Plus de trente ans ont été nécessaires pour en
apprendre un peu sur celle de John Fitzgerald Kennedy.» Un ange passa dans le studio, un
fantôme blond. Une douce source de chaleur qui s'est éteinte par une nuit d'août dans
la canicule de Californie.
Marilyn Monroe est morte il y a trente-six ans. Officiellement au matin du dimanche 5
août 1962, à 4 h 25. Elle avait 36 ans. Elle avait peur. Elle comptait encore sur deux
ou trois doigts les amis qui ne l'avaient pas trahie. Elle avait un chien, Maf, qui
aboyait. Les chiens jappent contre le malheur. On la déclara suicidée. Overdose. Trop de
médicaments, trop de dom Pérignon, trop de... Pas assez de chaleur humaine pour le corps
le plus moelleux qui fut jamais photographié. Depuis sa mort, plus de 110 livres sont
parus sur sa vie, ses dernières années, ses derniers mois, ses derniers jours, presque
sur son Jugement dernier. Tous, quasi tous, sauf certains, bâtis sur commande afin
d'engoncer le bon peuple dans la guimauve, ceux ne voulant que la montrer en gloire ou
ceux voulant profiter de sa beauté pour faire un peu de pognon - drame posthume qui
dupliquait celui d'une vie maltraitée - suggéraient, avançaient que ce suicide tenait
du crime, du meurtre, de l'assassinat. L'interrogation n'avait pas attendu longtemps.
Quelques semaines après les obsèques, dirigées par Joe Di Maggio, un vrai fidèle, un
vrai amour, quoique plutôt nerveux, sinon violent, et dont furent exclus tout Hollywood,
tout le cinéma, tout ce que Joe n'aimait pas.
L'un des premiers livres faisant clairement état d'un assassinat fut écrit en 1964 par
un ancien du FBI. Une sorte de Fox Mulder de drôles d'X Files, Frank Cappell, qui
s'interrogeait en 70 pages sur L'Etrange Mort de Marilyn Monroe (Strange Death of Marilyn
Monroe). Opuscule flingué à mort dès parution. Moqué. Mais lu de près par le tsar du
renseignement, le dictateur de la flicaille, Edgar J. Hoover, directeur inamovible et haï
du FBI. Lu également à la loupe par toute une famille du Massachusetts qui venait de
perdre, en novembre 1963, un de ses fils en la personne d'un président des États-Unis.
Et ce n'était pas fini.
Aujourd'hui sort, aux États-Unis, en Grande-Bretagne et en France, le même jour, le 15
octobre 1998, peut-être ce qui résume toute l'affaire, du moins, et cela est sûr, la
somme des enquêtes, recherches effectuées depuis la mort de Marilyn, augmentée de douze
ans de travaux, de fouinages, d'interviews et de contre-interrogatoires: Marilyn Monroe,
enquête sur un assassinat, de Don Wolfe. Ni un flic ni un journaliste d'investigation, un
acharné. Un homme de cinéma, qui collabora avec Spielberg, travailla sur maints films,
dont, naguère, Certains l'aiment chaud, de Billy Wilder. Starring Marilyn Monroe. Et
c'est de ce livre de 600 pages que L'Express, aujourd'hui, vous livre en exclusivité des
extraits.
Wolfe ne patauge pas dans la pleurnicherie, l'émotion de commande, la nostalgie, le chant
d'amour à la beauté saccagée. Il rend justice. Et la justice est sévère. Le livre de
Don Wolfe ne fait pas de quartier. Il démontre, montre, il livre, délivre, prouve. Le
lyrisme est bridé au profit de la précision. Résultat étonnant autant que détonant.
Car, à la lecture de ce réquisitoire fondé uniquement sur des faits, on ne peut
s'empêcher de penser au lyrisme fou, incantatoire, halluciné, et qui, par le biais de la
fiction, débusquait les crimes d'une société, des romans du cycle de Los Angeles,
signés de James Ellroy, et principalement d'American Tabloid, dont la couverture
affichait sur fond de Capitole les profils de médailles bénies de John et Bobby Kennedy.
Et rapportait, au hasard d'un surcroît d'intuition, matrice de l'intelligence exacerbée
par une passion de la vérité, ce que Don Wolfe, méthodique inspiré, vient de
démontrer. La vraie mort de Marilyn Monroe.
La comparaison n'a rien de choquante entre un ouvrage de fiction (Ellroy) et le résultat
d'une enquête interminable (Wolfe). Les écrivains sont tous des flics sentimentaux; et
non ripoux. Ils traquent l'explication, ce repos soudain de la raison agacée. Qu'Ellroy,
en 1995, ait débusqué comme ça, dans l'air, par le raisonnement simple des mots qu'on
jette sur le papier et qui tout à coup, sculptent un autre visage aux icônes ce que Don
Wolfe le méticuleux bâtit paragraphe par paragraphe, témoignage par témoignage,
s'échinant à donner 50 pages de sources dûment répertoriées en fin de volume,
ressemble fort à une grande belle vieille statue verdie par les âges mais qui mérite un
salut: celle de Liberty Island, à l'entrée de New York.
Les écrivains sont des êtres remarquables qui offrent en effet à leurs personnages, aux
sujets humains de leurs études, la plus grande liberté. Comment faire passer dans le
sens commun que lire le livre de Don Wolfe est libérer Marilyn? Non pas la venger, lui
donner une revanche. Le repos. Lui faire savoir par-delà l'Au-delà que jamais plus elle
ne sera plaquée. Sa terreur. Terreur d'une enfant qui, sortant d'un orphelinat, valsa
entre neuf familles d'accueil en quatre ans. Que les mufles autour d'elle _ on dut
planquer son cadavre dans un placard à balais pour qu'il échappe aux paparazzi _
s'ajoutaient aux salauds. Le dernier vient de mourir, il y a peu, et toute la presse a
célébré sa voix, son élégance, son génie. L'homme qui la fit violer - et filmer son
viol - par un patron de la Mafia: Frank Sinatra. Elle qui pensait l'épouser. Elle en
épousa d'autres, qui en ont bien profité. Miller, le grand Arthur Miller, une belle
conscience qui déclara lui faire un somptueux cadeau (moyennant 250 000 dollars et vivant
à ses crochets): le scénario des Misfits. Mise en scène John Huston, costarring Monty
Clift («la seule personne connue qui m'ait paru plus malheureuse que moi,» dixit M. M.)
et Clark Gable, le père irréel qu'elle s'était choisi sur photo. Sur le tournage
tragique - Monty et Gable n'en virent pas la sortie - Clark fut très gentil avec elle,
qui jouait le désespoir platine en robe à pois. A sa mort, on accusa Marilyn d'avoir
provoqué sa crise cardiaque par ses retards. Gable n'était plus là pour démentir. Et
la campagne de dénigrement était orchestrée de très haut. Par ceux pour lesquels
Marilyn Monroe ne fut qu'un «morceau de viande», hurla-t-elle le vendredi.
Elle mourut le dimanche. Une perdrix dans un tableau de chasse, une voix à écouter par
des micros cachés, une arme et un danger dans le maintien au pouvoir. Un objet. Mais cet
objet savait écrire, espérer. Croyait en quelque chose qui n'avait déjà plus cours, la
bête honnêteté des pères fondateurs. Ignorait que le FBI et la CIA détenaient un
dossier à son nom, dont le frère, en cyrillique, reposait au Kremlin. Marilyn avait ses
secrets. Elle les inscrivait dans un cahier rouge. Comme des notes de répétitions. Comme
un scénario à apprendre par cur. Il fallait le récupérer. En lisant Don Wolfe,
on sait que la décadence de la démocratie en Amérique date plus de la traque du cahier
rouge de l'ex-Norma Jeane chantée si joliment par Birkin que de l'étude de la robe bleue
de Monica. Quand l'Etat commet ses crimes, le nettoyage ne se fait pas au pressing pour
que la Maison paraisse Blanche. Marilyn Monroe, enquête sur un assassinat, par Don Wolfe.
Traduit de l'américain par Dominique Peters, Dominique Kugler, Nadine Gassié, Pierre
Girard et Andrée Nahline. Albin Michel, 592 p., 140 F.
Avant l'aube du dimanche 5 août 1962, un vent
chaud venu du désert Mojave balayait le bassin de Los Angeles, agitant les hauts
eucalyptus qui protégeaient comme un rideau la maison de Marilyn Monroe, à Brentwood. On
entendait tinter doucement dans l'obscurité les vieux carillons que lui avait offerts le
poète Carl Sandburg. D'autres sons, plus étranges, furent portés par le vent au cours
de la nuit: des cris, une vitre qu'on brise. Les voisins ont parlé d'une femme
hystérique qui aurait crié: «Assassins! Espèce d'assassins! Vous êtes contents,
maintenant qu'elle est morte?» A minuit, le sergent Jack Clemmons prit son poste au
commissariat de police de West Los Angeles, Purdue Street. Les premières heures de ce
dimanche, la garde du sergent Jack Clemmons fut très calme. Jusqu'à cet appel, peu avant
l'aube. Son interlocuteur se présenta: DR Hyman Engelberg. Et il dit: «Marilyn Monroe
est morte. Elle s'est suicidée.»
Croyant à une plaisanterie, Clemmons demanda: «Qui avez-vous dit que vous étiez? - Je
suis le DR Hyman Engelberg, le médecin de Marilyn Monroe. Je me trouve chez elle. Elle
vient de se suicider. - Donnez-moi l'adresse, j'arrive.»
Il regarda sa montre et nota dans le registre qu'il était 4 h 25 du matin.
Au 12305 5th Helena Drive, le sergent Clemmons entendit un chien aboyer. Il frappa à la
porte. Il entendit dans la maison des pas et des conversations murmurées. Il frappa de
nouveau. Il se passa une bonne minute avant qu'on allume la lampe du porche et qu'une
femme entre deux âges lui ouvre. Elle dit qu'elle était Eunice Murray, la gouvernante.
Elle conduisit le sergent Clemmons dans une chambre où gisait le corps, en travers du
lit. On avait rabattu un drap sur la tête, ne laissant visible qu'une mèche de cheveux
blond platine. Un homme à l'air distingué était assis, abattu, près du lit, la tête
baissée, le menton dans les mains, le DR Hyman Engelberg. Un autre homme, debout près de
la table de nuit, se présenta comme le DR Ralph Greenson, le psychiatre de Marilyn
Monroe.
«Elle s'est suicidée», dit le DR Greenson. Puis, montrant la table de nuit jonchée de
boîtes de comprimés, il désigna un flacon vide de Nembutal et ajouta: «Elle en a pris
tout le contenu.»
Clemmons se souvient: «Elle était à plat ventre dans ce que j'appelle ``la position du
soldat'': la tête dans un oreiller, les bras le long du corps, le bras droit légèrement
plié, les jambes allongées toutes droites.» Il avait vu bon nombre de suicides et,
contrairement à l'idée reçue selon laquelle une surdose de somnifères est une manière
facile et indolore de mourir, les victimes souffrent habituellement de convulsions
accompagnées de vomissements et meurent dans une posture très tourmentée.
«A-t-on bougé le corps? demanda Clemmons.
- Non, répondirent les médecins.
- Avez-vous tenté de la ranimer? demanda le sergent Clemmons.
- Non, nous sommes arrivés trop tard, répondit le DR Greenson.
- Savez-vous à quelle heure elle a pris les comprimés?
- Non.»
Clemmons avait l'habitude que les médecins l'informent spontanément. Mais il s'agissait
de la mort d'une star du cinéma. Quand le sergent se retourna pour parler à Mrs Murray,
il se rendit compte que la gouvernante avait quitté la pièce. Il la retrouva dans la
buanderie, où machine à laver et séchoir étaient en marche. Elle pliait du linge sur
le plan de travail et elle lui sembla agitée. Il sembla curieux au sergent Clemmons que
la gouvernante s'inquiète de la lessive en pleine nuit, alors que sa patronne gisait
morte dans sa chambre. Il demanda:
«Quand avez-vous découvert que Miss Monroe avait un problème?
- Peu après minuit, répondit Mrs Murray. J'étais allée me coucher vers 22 heures. J'ai
remarqué la lumière sous la porte de Marilyn. Je me suis dit qu'elle dormait ou qu'elle
parlait avec quelqu'un au téléphone. Alors je suis allée me coucher. Je me suis
réveillée à minuit parce que je devais aller aux toilettes. La lumière filtrait
toujours sous la porte de Marilyn. Alors je me suis inquiétée. J'ai essayé d'ouvrir la
porte, mais elle était fermée à clef de l'intérieur. J'ai frappé, mais Marilyn n'a
pas répondu. Alors j'ai appelé son psychiatre, le DR Greenson, qui n'habite pas très
loin. Quand il est arrivé, vers minuit et demi, elle ne lui a pas répondu non plus.
Alors il est sorti et il a regardé par la fenêtre de la chambre. Il a vu Marilyn
couchée, immobile, sur le lit, et il lui a trouvé une mine bizarre. Il m'a dit: ``Nous
l'avons perdue'', et puis il a appelé le DR Engelberg.»
Le corps de Marilyn avait été découvert à minuit et demi, et la police n'avait été
appelée qu'à 4 h 25. Le sergent Clemmons demanda aux médecins pourquoi il leur avait
fallu près de quatre heures pour appeler la police. Le DR Greenson répondit:
«Il nous a fallu obtenir l'autorisation du service de publicité du studio.
- Le service de publicité?
- Oui, le service de publicité de la Twentieth Century Fox. Miss Monroe y tournait un
film [Something's Got to Give].
- Qu'avez-vous fait pendant ces heures?
- Nous avons bavardé», marmonna le DR Engelberg.
Clemmons interrogea les médecins sur les circonstances qui avaient présidé à la
découverte du corps. Le DR Greenson raconta l'histoire presque dans les mêmes termes que
Mrs Murray. On l'avait appelé peu après minuit et il était arrivé vers minuit et demi.
Il avait dû casser une fenêtre avec le tisonnier pour accéder à la chambre, où il
avait trouvé Marilyn sur le lit. Il indiqua que sa main tenait fermement le téléphone,
quand il l'avait trouvée, et qu'il le lui avait alors presque immédiatement pris. Il
ajouta qu'elle avait dû essayer d'appeler à l'aide. Le sergent Clemmons trouva curieuse
cette hypothèse du DR Greenson, sachant que Mrs Murray était dans la maison, la porte de
sa chambre à trois mètres de celle de Marilyn.
Tandis qu'il rentrait au quartier général de la police de West Los Angeles, des idées
lancinantes occupaient l'esprit du sergent Clemmons: il était certain que le corps avait
été déplacé, et il se demandait de quoi les médecins avaient bien pu parler pendant
quatre heures, avant d'appeler la police. Pourquoi n'avait-il pas trouvé de verre dans la
pièce fermée à clef? [...]
Si la plupart des entreprises ferment, le
dimanche, à la morgue du comté de Los Angeles c'est en général le jour le plus actif.
C'est le plus souvent le samedi soir que les gens meurent dans des circonstances
curieuses. En 1962, le bureau du coroner du comté et la morgue étaient situés dans le
sous-sol du palais de justice, dans le centre-ville.
Le DR Thomas Noguchi, récemment nommé médecin légiste adjoint, arriva à 6 h 30 le
dimanche matin. Le coroner Curphey avait appelé le bureau avant son arrivée et laissé
un message: «Le DR Curphey veut que le DR Noguchi procède à l'autopsie de Marilyn
Monroe.» Noguchi ignorait que la star était morte et il pensa que la personne à
autopsier portait le même nom qu'elle. Quand il apprit qu'il s'agissait effectivement de
la célèbre Marilyn Monroe, il trouva curieux que le coroner Curphey l'ait choisi comme
légiste. «On aurait dû confier une autopsie de cette importance à un médecin plus
confirmé, déclara Noguchi. Et pourtant le DR Curphey avait bien spécifié que le
travail me revenait.» Le DR Noguchi vérifia la liste des corps arrivés à la morgue
dans la nuit de samedi à dimanche et fut surpris de ne pas trouver de Marilyn Monroe sur
la liste. Il interrogea l'assistant du coroner, Lionel Grandison. Celui-ci devait
vérifier les décès survenus dans le comté de Los Angeles et s'assurer que tous ceux
qui s'étaient produits dans des circonstances peu claires, ou hors de la présence d'un
médecin, étaient déférés au bureau du coroner. Grandison ne tarda pas à découvrir
une première irrégularité.
«Quand les gens meurent de cause naturelle à l'hôpital, leur corps y est généralement
conservé jusqu'à ce que les dispositions soient prises pour leur transport en vue des
funérailles, explique Grandison. Mais, quand la mort en question peut être un suicide ou
un meurtre, quand il s'agit d'un accident ou quand les causes sont tout simplement
inconnues, la loi dit que le corps doit être transporté à la morgue du comté, pour que
le bureau du coroner tire les conclusions adéquates.»
Grandison entreprit une recherche et trouva le corps de Marilyn Monroe aux pompes
funèbres de Westwood Village. «Pour que cela ait été possible, poursuit Grandison, il
a fallu que quelqu'un téléphone à l'entreprise de pompes funèbres et demande
spécifiquement qu'on vienne chercher le corps.» Il fut d'autant plus choqué de
découvrir que les responsables des pompes funèbres de Westwood Village préparaient
déjà le corps pour l'embaumement, si bien qu'ils étaient très réticents à l'idée de
l'envoyer au coroner. C'était une situation sans précédent, et son enquête ultérieure
amena Grandison à interroger le personnel des pompes funèbres de Westwood Village, mais
il ne réussit pas à découvrir qui avait demandé par téléphone que le corps soit
transporté dans leurs locaux. Peu après 9 heures du matin, Grandison fit prendre le
corps aux pompes funèbres et le fit placer dans le casier nº 33 de la morgue du comté
de Los Angeles, au palais de justice. Marilyn Monroe devint le cas nº 81128 dans les
dossiers du coroner.
Marilyn Monroe fut ainsi la première des stars à figurer dans la distribution morbide du
film de la vie professionnelle du DR Noguchi. Devaient suivre Sharon Tate, Janis Joplin,
William Holden, Natalie Wood et John Belushi. En 1968, il fit aussi l'autopsie de Robert
Kennedy. Noguchi publia alors un livre sur sa fréquentation des cadavres célèbres et
conquit le sinistre titre de «coroner des stars». Après la publication de son livre, en
1984, il fut démis de ses fonctions de directeur par l'administration de la ville à
cause d'une prétendue mauvaise gestion de son bureau et de la publicité tapageuse faite
autour de son métier de médecin légiste.
Peu avant le début de l'autopsie, John Miner, avocat général adjoint, spécialiste de
droit médical et psychiatrique, se joignit au DR Noguchi. John Miner était professeur
adjoint à l'école de médecine de l'université de Californie du Sud et, de même que le
DR Ralph Greenson, chargé de cours à l'Institut de psychanalyse de Los Angeles.
Le coroner du comté de Los Angeles, le DR Theodore Curphey, assistait, lui aussi, à
l'autopsie de Marilyn Monroe. Bien que sa présence n'eût jamais été révélée par le
bureau du coroner, Lionel Grandison a récemment déclaré: «Je me souviens du jour de
cette autopsie, et je peux affirmer que le DR Curphey était là... Je sais qu'il a
personnellement supervisé tout ce qui s'est passé.» La révélation de Grandison
explique peut-être pourquoi on avait assigné un tout nouveau médecin légiste au cas
nº 81128. «La présence du coroner Curphey à une autopsie était sans précédent,
affirme Grandison. Il a supervisé toute la procédure et orchestré le rapport final. Il
lui aurait été difficile de le faire avec le légiste en chef, qui aurait normalement
dû se voir confier cette tâche.»
A propos de la manière dont le coroner Curphey dirigea l'autopsie, Noguchi a déclaré:
«Tout jeune membre de l'équipe, je n'ai pas eu le sentiment que je pouvais m'opposer au
patron sur la procédure.» Le DR Noguchi et John Miner avaient lu les rapports de police
indiquant que Marilyn Monroe était morte dans une pièce fermée de l'intérieur et que
ses médecins pensaient qu'elle avait succombé à l'ingestion d'une trop forte dose de
barbituriques. Ils avaient aussi analysé les flacons de comprimés pris dans la chambre.
Le DR Engelberg avait déclaré à la police que, le vendredi 3 août, il avait renouvelé
l'ordonnance de Marilyn Monroe pour 50 comprimés de Nembutal. Le registre de la pharmacie
San Vicente indiquait que l'ordonnance avait été exécutée la veille de la mort. [Mais
ne mentionnait que 25 comprimés.]
Le DR Noguchi déclare que, bien qu'on n'eût découvert aucune seringue dans la pièce
fermée, l'autopsie commença par une recherche de points de perforation qui auraient
indiqué que des substances avaient été administrées par injection. Le rapport
d'autopsie indique clairement: «Pas de traces d'aiguille.» Dans le dossier, il est bien
dit que le DR Engelberg avait fait à Marilyn une piqûre le 3 août - la veille de sa
mort - vers 16 heures. Et, comme elle mourut vers 22 h 30 le lendemain, on observe que
trente heures s'étaient écoulées.
Le DR Noguchi, dans son livre, Coroner, explique combien il est difficile de découvrir
des traces de piqûres récentes. Il cite le cas de John Belushi. Après avoir examiné le
corps de ce dernier, la police avait éliminé l'injection d'une substance toxique comme
cause de la mort parce que le personnel du coroner n'avait pas réussi à découvrir de
traces de piqûre. Le chef de la division de médecine légale, le DR Ronald Kornblum,
examina le corps de Belushi et fut incapable, lui aussi, de découvrir une trace de
pénétration d'aiguille - pas plus que le DR Noguchi. Mais celui-ci, soupçonneux depuis
qu'on avait retrouvé de la poudre de cocaïne sur le lieu du décès, persista: «J'ai
pris le bras droit de Belushi dans mes deux mains, et je l'ai pressé, raconte le
docteur... Soudain, une gouttelette de sang est apparue au creux du coude, mais le fait
que les piqûres récentes aient été si difficiles à découvrir m'inquiéta... On avait
utilisé une aiguille stérile et seules des gouttelettes de sang le révélaient.» Autre
sujet d'inquiétude lors de l'examen externe du corps: la lividité cadavérique. Elle est
causée par l'effusion hors des vaisseaux du sang qui s'accumule dans les parties les plus
basses du corps dans les heures qui suivent la mort. Il y produit des taches qui vont du
gris bleuâtre au violacé. Dans son rapport, le médecin mentionne deux zones de
lividité: le visage, le cou, les bras, la poitrine et l'abdomen, d'une part, et «une
légère lividité qui disparaît à la pression sur la face postérieure des bras et des
jambes», d'autre part. Cette double lividité présente une grande importance légale.
Les zones de lividité secondaires se forment quand on bouge un corps pendant que
s'installe la lividité cadavérique, processus qui dure généralement quatre heures
après le moment de la mort. Par exemple, si un corps repose sur le ventre pendant trois
heures après la mort et qu'ensuite il soit mis sur le dos, une zone de lividité
secondaire peut apparaître sur le dos pendant l'heure qui suit. Le DR Noguchi et John
Miner auraient pu envisager cette possibilité quand ils remarquèrent cette double
lividité. On sait maintenant que Marilyn Monroe est morte vers 22 h 30 le samedi soir.
Son corps a été retourné et placé sur le brancard par Guy et Don Hockett [des pompes
funèbres] huit heures après la mort, soit quatre heures après la fin du processus
d'installation de la lividité cadavérique. En conséquence, la légère lividité
remarquée sur son dos n'a pu se produire qu'immédiatement après la mort, quand le corps
est resté un temps sur le dos avant qu'on le place à plat ventre sur le lit.
Le rapport du DR Noguchi signale deux contusions récentes sur le corps de Marilyn: «une
petite ecchymose sur la fesse gauche et une autre à gauche sur la chute des reins».
Pourtant, à en croire Lionel Grandison, d'autres bleus étaient visibles sur le corps de
Marilyn, ignorés par le document officiel. «Quand un corps est amené à la morgue,
explique Grandison, il est immédiatement inspecté par un assistant médical. A ce stade,
tous les bleus, cicatrices, coupures et autres traumatismes sont indiqués sur une
première fiche d'examen. Cette fiche est intégrée au dossier officiel.» Lionel
Grandison déclare qu'il a vu cette fiche le matin du 5 août et qu'elle signalait les
bleus sur la fesse indiqués dans le rapport d'autopsie, mais aussi d'autres bleus, sur
les bras et à l'arrière des jambes. Selon Grandison, «la fiche de cet examen initial
faisait partie du dossier qui disparut quand l'affaire prit de l'ampleur». Le fait que
ces bleus évidents n'aient conduit à aucune interrogation, et que les plus petits ne
furent même pas notés, constitue une omission troublante.
Le DR Noguchi admit, lors d'une interview, en 1982, qu'on aurait dû s'intéresser au gros
bleu pourpre sur la fesse gauche. «Ce bleu, dit-il, n'a jamais été totalement
expliqué. C'est un signe de violence.» Après l'examen externe, le DR Noguchi passa à
l'examen interne. Il ouvrit l'estomac, et John Miner et lui en ont examiné le contenu, à
la recherche de traces des comprimés de Nembutal qu'elle aurait ingérés. Ils ont donc
été surpris de trouver l'estomac totalement vide. «Il y avait dans l'estomac une petite
quantité de liquide, se souvient John Miner, mais nous n'y avons détecté aucun signe
qui aurait indiqué qu'il avait contenu une forte dose de médicaments ou de sédatifs.»
«Un prélèvement du contenu gastrique examiné sous microscope polarisant ne montre pas
de cristaux réfringents», déclare le rapport d'examen. Selon le DR Sidney S. Weinberg,
ancien médecin légiste en chef du comté de Suffolk, New York, «la mort par ingestion
d'une grande quantité de barbituriques est incompatible avec l'absence de cristaux
réfringents dans le tube digestif. Sous microscope polarisant, on aurait pu déterminer
la nature exacte du produit ayant entraîné la mort, car ces médicaments ont chacun leur
forme cristallisée particulière». De plus, le DR Weinberg et plusieurs autres médecins
légistes de renom ont souligné qu'on appelle le Nembutal la «veste jaune» à cause du
jaune de la gélatine qui entoure le produit actif. Si Marilyn Monroe avait avalé une
cinquantaine de comprimés de Nembutal, comme on l'a dit, il y aurait eu des traces de
teinture jaune dans le tube digestif, surtout dans un estomac vide. Le DR Noguchi ne
trouva aucune trace de teinture jaune. Pour examiner l'intestin, le DR Noguchi et Miner
commencèrent par regarder le duodénum, la première section après l'estomac. Quand des
comprimés ont séjourné un certain temps dans l'estomac, il arrive que des résidus
passent dans le duodénum. «Je n'ai pas trouvé la moindre preuve visuelle de la
présence de comprimés dans l'estomac ou l'intestin grêle, déclara le DR Noguchi. Aucun
résidu. Pas de cristaux réfringents. Et pourtant les flacons de comprimés vides
montraient que Marilyn Monroe avait avalé de 40 à 50 comprimés de Nembutal et un grand
nombre de comprimés d'hydrate de chloral.»
L'un des problèmes posés par l'examen ne fut donc pas tant ce que le DR Noguchi et John
Miner trouvèrent, mais ce qu'ils ne trouvèrent pas.
Autre facteur important lors de l'examen tant externe qu'interne: l'absence d' «odeur de
poire». Les médecins légistes savent que les victimes d'une ingestion d'hydrate de
chloral dégagent une forte odeur, dite «de poire». Ce n'est pas le cas lorsque la dose
fatale d'hydrate de chloral a été injectée par voie intraveineuse et non ingérée par
le tube digestif.
L'autopsie sur le corps avait duré cinq heures. On ramena ce qui restait de Marilyn
Monroe dans le casier nº 33 de la morgue.
C'est peu après 22 heures, ce dimanche soir, que le photographe de Life Leigh Wiener
s'introduisit dans la morgue du comté. Moyennant une bouteille de whisky, l'employé de
la morgue lui ouvrit le casier nº 33 et en tira le corps pour que Wiener prenne quelques
photos. Il en prit plusieurs du cadavre, couvert et découvert. Ce fut la dernière
séance de photos de Marilyn Monroe.
Le petit carnet rouge
Robert Slatzer [auteur des Derniers Mois de
Marilyn Monroe, un de ses plus fidèles amis] rencontra, le jeudi 9 août, chez la star
son exécutrice testamentaire, Inez Melson. «Inez triait ce qui restait des papiers de
Marilyn dans le classeur du pavillon d'amis, raconta Slatzer. Elle me dit que, lorsqu'elle
était arrivée là le dimanche matin, elle avait découvert le meuble classeur fracturé
et que beaucoup des affaires de Marilyn avaient disparu.»
Marilyn s'était toujours inquiétée de la sécurité de ses papiers. En faisant visiter
à Slatzer sa nouvelle maison, au mois d'avril 1962, elle avait signalé que des documents
ne cessaient de disparaître de ses dossiers et qu'elle avait ordonné qu'on change les
serrures et qu'on mette des barreaux aux fenêtres du pavillon d'amis. Lorsqu'il quitta la
maison de Marilyn ce jour-là, Slatzer repensa à la dernière fois où il l'avait vue.
C'était à la mi-juillet. Elle l'avait appelé d'une cabine et sa voix était pressante.
«Viens me prendre à 18 heures», avait demandé Marilyn. Elle l'attendait à l'endroit
convenu, silhouette solitaire que personne n'avait reconnue - sans maquillage, portant de
grandes lunettes de soleil, ses cheveux blonds attachés en queue de cheval sous un
foulard. «Salut!» dit-elle avec un grand sourire en montant près de lui dans la
Cadillac.
En chemin, elle parla de ses peurs et de ses inquiétudes. Peu après le gala
d'anniversaire du président, en mai, on lui avait brutalement interdit toute
communication avec lui, et la ligne de téléphone privée sur laquelle elle l'appelait
avait été coupée. Peter Lawford avait dit sans ambages à Marilyn que plus jamais elle
ne devait parler au président.
«Cela lui causa un choc émotionnel dévastateur qui la fit s'effondrer sur le plateau de
Something's Got to Give, a raconté Slatzer. Dans sa rage et son désespoir, elle appela
plusieurs fois la Maison-Blanche pour exiger une explication. Bobby devint l'émissaire
chargé de calmer les fureurs de la femme délaissée. Avant ce jour, je n'avais jamais
saisi jusqu'où étaient allées ses relations avec Bobby. Lors de notre dernière
rencontre, elle me confia que récemment Bobby avait aussi tenté de rompre avec elle.
Comme John, il n'avait fourni aucune explication.» Les Kennedy avaient touché le point
sensible de sa terreur du rejet, et son désespoir s'était mué en colère, comprit
Slatzer.
Sortant un cahier à couverture rouge de son grand sac, Marilyn avait montré à Slatzer
son «Carnet de secrets». «Qu'est-ce que c'est? - Mon journal. Je veux que tu le
lises.» Slatzer se souvient d'avoir feuilleté les pages et d'avoir été surpris d'y
trouver des notes sur ses conversations avec les Kennedy. Elle y abordait des sujets comme
le projet d'utiliser le syndicat du crime pour assassiner Fidel Castro, les essais
nucléaires, les liens de Sinatra avec la pègre, les droits civiques, les efforts de
Bobby pour faire arrêter Jimmy Hoffa; une page indiquait que c'était Bobby qui avait
convaincu le président de retirer le couverture aérienne lors du désastre de la baie
des Cochons. Quand Slatzer se rendit compte de l'importance de ce journal, il lui demanda
pourquoi elle avait pris ces notes.
«Parce que Bobby aimait parler d'affaires politiques, lui répondit-elle, et je voulais
pouvoir discuter de choses qui l'intéressaient. Alors je prenais des notes après nos
conversations, et ensuite j'en apprenais autant que je pouvais sur les sujets abordés
pour pouvoir en parler intelligemment. - Quelqu'un d'autre a-t-il vu ce carnet? demanda
Slatzer. - Personne... Mais je suis tellement en colère que je serais capable de
convoquer une conférence de presse et de le montrer au monde entier pour que tout le
monde sache qui sont vraiment les Kennedy!»
Slatzer tenta de la convaincre d'oublier les Kennedy et de se concentrer sur sa carrière:
«Il est évident que Bobby ne veut plus continuer avec toi, tu ferais mieux de l'oublier,
lui conseilla-t-il. - Ce n'est pas facile», répondit-elle. [...]
Le samedi 4 août 1962, le vent sec du désert
chauffait le bassin de Los Angeles, et, dès 9 heures du matin, il faisait près de 27
ºC. Marilyn avait passé une bonne partie de la nuit debout. Les rideaux tirés, la
chambre plongée dans le noir était étouffante - et puis il y avait eu une série
d'appels troublants. Une femme, dont Marilyn n'était pas sûre de reconnaître la voix,
l'avait appelée à plusieurs reprises, entre minuit et le lever du jour, pour lui dire:
«Fichez la paix à Bobby!» en la traitant de «traînée». [...]
En début d'après-midi, le vrombissement d'un hélicoptère retentit entre les cloisons
de la salle de tournage de la Fox. Un gardien de la sécurité plissa les paupières,
ébloui, quand l'appareil amorça sa descente sur l'héliport, près du plateau 14. Comme
l'indique le registre de la sécurité du studio, l'hélicoptère avait reçu
l'autorisation d'atterrir peu après 11 heures. Une limousine gris foncé attendait dans
l'ombre tandis que l'hélicoptère se posait en soulevant un tourbillon de poussière.
L'attaché de presse du studio, Frank Neill, travaillait près de l'aire d'atterrissage le
samedi. Il fut surpris de voir Bobby Kennedy sauter à terre et foncer sur la limousine.
Après avoir nié pendant vingt-trois ans, Eunice Murray a reconnu en 1985 que Bobby
Kennedy s'était rendu chez Marilyn le 4 août 1962. «J'étais dans le living quand il
est arrivé. Elle n'était pas habillée.» [...]
D'après Norman Jefferies [gendre d'Eunice et homme à tout faire], Robert Kennedy arriva
entre 15 et 16 heures en compagnie de Peter Lawford. «Mr Lawford nous a demandé de
disparaître, Eunice et moi, et il nous a envoyés au supermarché. Il m'a donné de
l'argent en me disant d'acheter des Coca. A notre retour - une heure plus tard - la
voiture était partie, Marilyn était en pleine crise d'hystérie. Je n'avais jamais vu
ça. Elle avait une trouille noire.»
Les révélations de Jefferies ont été corroborées par Sidney Guilaroff [coiffeur de
Marilyn et son ami depuis les années 40]. Dans une interview de 1995, Guilaroff a
déclaré pour la première fois qu'il avait parlé deux fois à Marilyn ce jour-là. La
première, en fin d'après-midi ou en début de soirée. «Quand Marilyn m'a appelé, elle
était en larmes et j'avais du mal à la comprendre. Quand j'ai réussi à la raisonner et
lui ai demandé quelque chose du genre: ``Mais qu'est-ce qui se passe, ma chérie? '' elle
m'a dit: ``Bobby Kennedy est venu ici et il m'a menacée, il a crié après moi et m'a
bousculée! '' J'ai dû répondre plus ou moins: ``Qu'est-ce que Robert Kennedy fichait
chez toi? '' parce que je ne savais strictement rien de son aventure avec Bobby en plus de
John. Maintenant, elle se croyait en danger. Bobby avait l'impression qu'elle
représentait un problème et lui avait dit: ``Si tu me menaces, Marilyn, on ne manque pas
de moyens de te faire taire.''»
Les écoutes [d'Otash, voir page 122] avaient enregistré en continu une querelle entre
Marilyn et Bobby Kennedy tandis qu'ils passaient d'une pièce à l'autre. «Marilyn et
Bobby se disputaient violemment, et elle lui a dit: ``J'ai l'impression d'être jetée!
J'ai l'impression d'avoir été utilisée.''» Earl Jaycox, l'assistant d'Otash, a
confirmé que Marilyn hurlait tandis que Bobby Kennedy essayait de la convaincre de lui
donner son journal et les papiers: «Où est-il? Où est-il?» Elle cria qu'on la traitait
comme un «morceau de viande».
En 1985, Anthony Summers a été mis en contact par Mark Monsky, directeur de
l'information sur NBC, avec quelqu'un du gouvernement qui avait entendu une quarantaine de
minutes des bandes Otash-Spindel, notamment ce qui s'était passé chez Marilyn le jour de
sa mort. On avait mis en marche le magnétophone, qui avait révélé «deux visites de
Robert Kennedy». Lors de la première, «on pouvait entendre Marilyn et Kennedy parler».
La bande enregistra alors la conversation, qui vira à l'altercation: «Les voix parlaient
de plus en plus fort, a-t-il raconté. Ils se disputaient à cause de quelque chose que
Robert Kennedy avait promis. Comme ils se bagarraient, les voix devinrent plus perçantes.
Il n'arrêtait pas de revenir à la charge: ``Où est-il? Où est ce putain de truc? On a
besoin de savoir. C'est important pour la famille. On peut prendre toutes les dispositions
que tu veux! '' Il y eut ensuite des coups et le bruit de quelque chose qui tombe, et
Marilyn Monroe qui hurlait.» La scène se terminait par le bruit d'une porte qu'on
claque.
D'après ses déclarations, le Dr Greenson arriva chez Marilyn entre 16 h 30 et 17 heures.
Il donna trois versions différentes des motifs de sa visite. [...] Norman Jefferies a
dévoilé la vérité sur la visite du docteur. Après s'être vus congédiés par Lawford
lorsqu'il avait débarqué avec Bobby Kennedy en milieu d'après-midi, Eunice Murray et
lui avaient trouvé Marilyn en pleine hystérie à leur retour, à 16 h 30. Mrs Murray
avait alors appelé Greenson.
La visite de Greenson s'acheva vers 19 heures. Il lui conseilla de prendre du Nembutal
pour passer une bonne nuit. A la demande de Mrs Murray, Norman Jefferies passa aussi la
nuit sur place.
Pendant les dernières heures de sa vie, Marilyn se raccrocha à son meilleur ami: le
téléphone. «C'est entre 20 heures et 20 h 30 que j'ai eu de nouveau Marilyn au
téléphone, raconte Sidney Guilaroff. Elle allait beaucoup mieux et avait vu son
psychiatre, le Dr Greenson. J'ai essayé d'apaiser ses angoisses. Elle a conclu la
conversation avec cette remarque provocante: ``Tu sais, Sidney, je sais un tas de secrets
sur les Kennedy. - Quel genre de secrets? ai-je demandé. - Des dangereux'', a-t-elle
répondu, et elle a raccroché.» [...]
Entre chien et loup, trois hommes descendirent 5th Helena Drive. L'un deux portait une
petite sacoche noire ressemblant à une serviette de médecin. Elizabeth Pollard, une
voisine de Marilyn, invitait souvent quelques amies à jouer aux cartes le samedi soir.
Elles virent «Bobby Kennedy entrer dans la maison de Marilyn juste après le
crépuscule», ont-elles déclaré au sergent Jack Clemmons plusieurs mois après la mort
de Marilyn. Elles faisaient un bridge «et Bobby Kennedy est carrément passé par la
fenêtre pour pénétrer chez Marilyn». Ces femmes dirent à Clemmons que le ministre
était accompagné de deux hommes.
La ligne directe de Marilyn sonna peu après 21 h 30. C'était une voix amie, celle de
José Bolaños [scénariste d'origine mexicaine, ami de M. M. depuis février]. Il était
de retour à Los Angeles pour voir Marilyn et appelait d'un bar de Santa Monica Canyon. Il
a seulement révélé que Marilyn lui dit «quelque chose de scandaleux... quelque chose
qui, un jour, sera un choc pour le monde entier», et a ajouté que Marilyn s'éloigna du
téléphone au cours de la conversation. Elle ne raccrocha pas, mais posa l'écouteur
pendant qu'il attendait au bout du fil. Elle ne revint jamais.
Jefferies raconte qu'entre 21 h 30 et 22 heures Robert Kennedy apparut à la porte,
accompagné de deux hommes. Ils donnèrent l'ordre à Jefferies et à sa belle-mère de
déguerpir. [...]
Réfugiés chez des voisins, Eunice Murray et Jefferies virent Bobby et les deux hommes
s'en aller. [...] En entrant dans le pavillon d'amis, ils découvrirent Marilyn dévêtue,
allongée en travers sur le divan. «J'ai cru qu'elle était morte, déclara Norman
Jefferies. Elle était sur le ventre, une main tenant plus ou moins le téléphone. Je
n'avais pas l'impression qu'elle respirait et elle avait une couleur affreuse... Eunice a
pris le téléphone pour appeler une ambulance. Puis elle a appelé en urgence le Dr
Greenson, qui a dit qu'il arrivait tout de suite. Je suis allé au portail attendre
l'arrivée de l'ambulance.»
Hall [l'ambulancier] confirma avoir trouvé Marilyn dans un état comateux sur le divan du
pavillon d'amis, précisant qu'ils l'avaient mise sur le dos par terre pour essayer de la
ranimer. Lorsque le Dr Greenson arriva, il donna l'ordre d'arrêter et de tenter une
réanimation cardio-pulmonaire. Il injecta une piqûre d'adrénaline directement dans le
cur, mais l'aiguille heurta une côte. Hall dit que Marilyn succomba quelques
instants plus tard.
Après, ce fut la folie, dit Jefferies. Ce fut horrible. Il y a eu les voitures de police,
les camions des pompiers, d'autres ambulances... tout ce qu'on veut! Un hélicoptère de
la police s'est posé sur le terrain de golf et, bientôt, ça grouillait de partout.» Le
Dr Engelberg arriva autour de minuit et le corps de Marilyn fut transféré du sol du
pavillon d'amis à sa chambre, dans la maison principale. Jefferies a déclaré que le
scénario d'un suicide «à huis clos» fut formulé. [...] D'après lui, il y avait au
moins une douzaine de policiers en civil qui s'agitaient au 12305 5th Helena Drive - puis,
brusquement, plus personne. Le responsable fut identifié plus tard par Billy Woodfield et
plusieurs anciens membres de la police de Los Angeles comme étant le capitaine James
Hamilton, du bureau du renseignement de la police de Los Angeles, un ami de Robert
Kennedy, et on reconnut dans les deux hommes qui avaient accompagné Bobby chez Marilyn ce
soir-là deux détectives chargés de la sécurité de Kennedy.
Avaient-ils vraiment l'intention d'assassiner Marilyn? Ou voulaient-ils seulement la
neutraliser en lui collant une bonne dose pour qu'elle les laisse tranquillement fouiller
dans ses papiers rangés dans le pavillon d'amis, juste le temps de mettre la main sur les
notes et les lettres, les documents officiels et son journal intime? Elle a reçu une
injection en présence de Bobby Kennedy et la dose était assez forte pour tuer 15
personnes (voir encadré).
Dans l'urgence, on rangea avec soin la maison de la star, on fit saisir les archives
téléphoniques, on détruisit papiers et autres notes - et on passa un appel affolé à
la Maison-Blanche.
La preuve au milligramme
Le véritable verdict sur la mort de Marilyn
s'est toujours trouvé dans les informations apportées en 1962 par le rapport
toxicologique du Dr Raymond Abernethy. Selon ce rapport, l'analyse chimique montre
clairement que le sang contenait 4,5 milligrammes pour 100 millilitres de barbituriques et
8 milligrammes pour 100 millilitres d'hydrate de chloral. L'analyse par ordinateur fait
apparaître que le cas nº 81128 aurait dû ingérer de 27 à 42 comprimés de Nembutal
(c'est-à-dire de pentobarbital) et de 14 à 23 comprimés d'hydrate de chloral pour que
soient atteintes de telles concentrations. Les dosages opérés sur le sang révèlent
donc l'ingestion de 41 à 65 comprimés. Mais cela n'inclut pas les 13 milligrammes par
100 grammes de pentobarbital qu'Abernethy retrouva dans le foie. Or il aurait fallu de 11
à 24 comprimés supplémentaires de Nembutal pour expliquer cette concentration du
produit dans le foie.
Nous arrivons donc à un minimum de 52 et à un maximum de 89 comprimés nécessaires pour
que le cas nº 81128 succombe effectivement à cette dose létale par ingestion.
Pourtant, sur les milliers de cas fatals dus à un empoisonnement aigu par ingestion de
barbituriques qui ont été conservés dans les banques de données du monde entier, il
n'y a pas un seul cas où plus de 12 comprimés aient été absorbés sans qu'on en
retrouve des résidus dans le tube digestif. Dans aucun cas on n'a observé chez une
victime une concentration si élevée de pentobarbital dans le sang et d'hydrate de
chloral dans le foie sans retrouver de cristaux réfringents ni aucune concentration de
comprimés dans l'estomac ou l'intestin. Le Dr Noguchi a pourtant bien déclaré n'avoir
pu déceler aucun résidu de comprimé, aucune trace de cristaux réfringents, aucune
concentration de barbituriques dans l'estomac ou l'intestin. Or Marilyn Monroe était au
plus haut des taux de barbituriques dans le sang. Elle présentait aussi une forte
concentration d'hydrate de chloral, qui agit en synergie avec le pentobarbital et en
augmente énormément l'effet létal. Les doses combinées auraient suffi pour tuer de 9
à 20 personnes.
Les banques d'information de médecine légale établissent également qu'il n'existe à
leur connaissance aucun cas d'une dose fatale par ingestion entraînant une aussi forte
concentration dans le sang de pentobarbital et d'hydrate de chloral associés. La victime
meurt inévitablement avant que la concentration approche ce niveau dans le sang. Marilyn
Monroe aurait été déjà morte quand moins de 35% de la quantité totale de
barbituriques seraient passés du tube digestif dans le sang. Il eût été impossible au
reste du pentobarbital et de l'hydrate de chloral de pénétrer dans le système sanguin
à la suite d'une ingestion, par le biais d'un suppositoire, d'un lavement ou par tout
autre processus. Comment, alors, la dose fatale a-t-elle été administrée? Cela n'a pu
se faire que par intraveineuse - ce genre de piqûre létale où la victime perd presque
immédiatement conscience et succombe en dix à vingt minutes.
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